Hier soir sur la scène du Charlie Jazz Festival au domaine de Fontblanche, était programmé le bassiste Camerounais Richard Bona. De Joe Zawinul à Stevie Wonder, en passant par le Pat Metheny Group ou Steps Ahead, cet artiste hors normes propose toujours une musique aux rythmes très différents selon les compositions. Puisant dans son Cameroun Natal, le bassiste aime la Soul, le groove, les rythmes Caribéens et Cubains.
En première partie, ce sont les racines de la musique Africaine qui ont été explorées, une sorte de retour aux sources en compagnie de la chanteuse Naïny Diabaté, accompagnée de la pianiste Eve Risser. L’artiste Française par ses accords puissants et ses arpèges au son métallique, ont servi de toile de fond à la voix de la chanteuse, habitée littéralement par les mélodies traditionnelles.
La pianiste au jeu nerveux crée des climats harmoniques abstraits.
Sur “Terrena”, l’intensité des accords de piano propulse la voix qui semble rencontrer les esprits, dans un climat grave et solennel.
A ce duo énergique succéda celui que tout le monde attendait avec impatience, Richard Bona. À peine a t il joué quelques notes, qu’il nous transporta et nous transperça dès les premiers motifs de basse. Par sa puissance, le son la mise en place, le Camerounais est un véritable orfèvre.
Le concert s’ouvre par la chanson intitulée “Kalabancoro” emplie de nostalgie. Cette mélodie est jouée au saxophone alto et interprétée par la voix épurée, sur un groove nourri par la basse et la batterie. Avec quelques notes de basse en accompagnement, je suis déjà impressionné.
Lorsque le clavier et la guitare introduisent “Te Misea” par des nappes cristallines et des notes aiguës, je m’imagine dans des grands espaces sous marins. Le refrain de cette mélodie lumineuse apaise et installe un climat cool. L’alto Lucas Saint-Cricq joue un solo dépouillé de toute technique, enrobé d’une rythmique légère.
Si le bassiste est imprégné des mélodies et de rythmes issus de son pays natal, il aime groover dans le style Soul et Funk.
Très vite, le bassiste appelle les claps du public lorsqu’il lance des motifs Bluesy sur la troisième chanson “Please Don’t Stop”. Les accords Funky de la guitare, cette basse subtile et le jeu de batterie de Nicolas Viccaro mêlent sensualité et énergie. C’est une communion qui s’établit entre le bassiste et le public, des motifs de Blues qui donnent une énergie terrible jusqu’au bout, se concluant par un solo de guitare au son saturé.
On est emmenés par les nappes de synthés de Mickael Joseph et les notes aiguës de guitare.
Une magnifique ballade arrive ensuite, intitulée “Dream Land”. Le toucher de basse est d’une grande sensualité assortie des variations de volume des accords de guitare. Dans ce monde de rêves, l’émotion est pure.
Le claviériste joue un solo très Blues en usant d’effets sonores particuliers. Le batteur crépite sur la caisse claire et le bassiste ne cherche qu’à conquérir le cœur du public par la finesse des notes. Au fil de “Dreamland”, des moments émouvants comme le chant du guitariste CIRO MANNA, au vocoder et la fin du thème, chantée par Richard avec fragilité..
Le groupe interprète “Shiva Mantra”, une chanson écrite par le bassiste, inspirée de l’Inde après un séjour là-bas. Vers la fin de ce morceau, le climat devient plus nerveux où les accents Rock du guitariste se mélangent aux motifs Indiens, dont l’intensité nous hypnotise.
Richard Bona reprend ensuite un classique de Weather Report “Teen Town”, par le bassiste Jaco Pastorius. Ce classique est introduit par le batteur qui joue sur la caisse claire, la grosse caisse et la charlet. Arrive ensuite le solo de basse sur le up Swing.
Le thème est rejoué par le saxophone, la basse, le clavier et la guitare.
Après ce tonnerre sonore et ce solo impressionnant à la Jaco, le bassiste poursuit par “Bisso Baba”, un thème poétique aux accords émouvants, une basse discrète et un motif à l’ alto très mélodieux. Un second mouvement plus dynamique laisse la place au guitariste Ciro Manna qui prend un solo à la Hiram Bullock.
La formation enchaîne par la chanson “O Sen Sen Sen” aux rythmes syncopés, puisant dans les Caraibes. Lucas Saint Cricq part dans un solo enjoué, puis le claviériste Mickael Joseph poursuit par des phrases fluides, ensoleillées qui riment avec mélodie.
Ce morceau rayonne et le public fait les claps.
Le bassiste varie les rythmes et ce qui captive dans sa musique. Tantôt c’est le groove tantôt les balades et tantôt les rythmes des Caraibes.
Des pointes de Rock peuvent s’entendre dans le morceau de fin intitulé “Diba La Bobe”. La mélodie se déploie avec en fond des accords énergiques au son saturé, sur un rythme proche du Zouk.
Le groupe conclut le concert par une mélodie du premier album “Scenes From My Life”, intitulée “New Bell”. Ce morceau respire la douceur et la poésie.
Une fois de plus, le bassiste nous a comblés par son répertoire de qualité, ses rythmes différents, ses mélodies séduisantes. Pour couronner le tout, sa générosité et son humour apportent du bonheur et de la décontraction.
Pendant près de deux heures, le quintet alterna énergie et émotion sur un répertoire presque totalement original. Chaque morceau nous fait prendre conscience ou nous rappelle, quel grand compositeur est Richard Bona, un poète des mélodies, des harmonies et un rythmicien exceptionnel.