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SUR LA ROUTE DU JAZZ/ STANLEY JORDAN

C’est l’histoire d’un prodige de la guitare qui joue à la façon d’un pianiste.
Il plaque les accords à la main gauche pendant que les doigts de la main droite jouent les notes en tapant sur le manche.
C’est en regardant le film « Boire et Déboires » de Blake Edwards que je découvre ce musicien pas comme les autres.
En 1982, il sort son premier album dont le seul titre que j’ai pu écouter est « Touch Of Blue » un très joli Blues mineur.
On entend le jeu en octaves des lignes en pentatoniques et des phrases Jazzy.
Les doigts de la main droite sont dans l’axe des cordes et viennent percuter le manche.
L’approche qui est la sienne est celle du tapping sauf que la main gauche se déplace en jouant des accords et lignes de basse.
Le guitariste poursuit en 1984 par le disque « Magic Touch » quand nous avons parlé de « The Lady In My Life ».
Commençant par « Eleanor Rigby » on entend l’effet percussif des doigts sur le manche.
Stanley Jordan montre également sa palette harmonique avant de décliner la mélodie.
Si le thème « Freddie Freeloader » est joué sobrement, le guitariste impressionne en livrant un solo aux phrases Be-Bop et d’autres plus bluesy. dont le flot de notes est assez important.
gé à peine de vingt six ans, le guitariste impressionne par l’unicité de son jeu. La reprise de « Round Midnight » est intimiste et alterne avec des séquences enflammées.
Si vous regardez certaines vidéos, vous pourrez voir le guitariste jouer sur deux guitares l’une étant posée sur un pied.
Le guitariste confectionne un univers sonore d’une grande sophistication harmonique.
Le climat Folk sur « Angel » me rappelle des accents de Little Wing ».
Le jeu est captivant tant les deux mains sont indépendantes. « Fun Dance » swingue terriblement. Sur « New Love », on entend la flûte exposer la mélodie aux accents Sud Américains traduisant un chaleur et une convivialité.
La contrebasse qui démarre seule sur « Return Expédition » se fait rejoindre par les arpèges cristallins de guitare. L’improvisation de guitare est intense, les notes sont jouées par flots.
Pour conclure ce disque, Stanley Jordan reprend la mélodie de Thad Jones « A Child Is Born ». Ce que j’aime chez cet artiste c’est ce toucher brut sans fioritures très lyrique et bluesy par moments.
Après cet album qui constitue une nouvelle voie du chapitre de la guitare Jazz, le jeune guitariste explore les standards dans « Standards Vol 1 ». Au cours de cette session vous apprécierez la version de « Georgia On My Mind » une séquence au cours de laquelle le Blues est roi.
En 1988, il signe « Flying Home », un album démarrant par un morceau smooth au groove puissant intitulé « Street Talk ».
En 1989, il donne un concert à New York qui sortira sous le nom de « Live In New York ». Au cours de cette session figurent « Cousin Mary » et  » Impressions », deux morceaux de John Coltrane, dont le second fut inspiré de « So What ».
Stanley y joue une improvisation enflammée qui monte en intensité au fur et à mesure.
La version la plus grandiose figurera sur le disque « Stolen Moments » de 1991 qu’on retrouve sur « Cornucopia » en 1990, titre éponyme qui lui dure plus de vingt et une minutes. Si la version de « What’s Going On » est certes bien interprétée, le morceau qui retient mon attention est « Always Knows » un thème qui groove.
Sur « Stolen Moments » en 1991, le guitariste reprend « Stairway To Heaven » de Led Zeppelin.
En 1994 il sortira « Boléro » où il reprend « Chaméleon » d’Herbie Hancock ». Pour célébrer le roi du Funk, Stanley sort des cocottes endiablées
Plus loin dans le disque il joue « Pato’s Blues » où l’on entend un toucher précis, des envolées Bluesy.
« Dreams Of Peace » en 2003 illustre quelques expérimentations au niveau de l’esthétique en compagnie de Nicolesi « Novecento ». Ce disque est principalement orienté vers le Smooth.
« State Of Nature » en 2008 est un très beau projet qui commence par une composition intitulée « A place In Space » où s’enchainent de très beaux accords. On entend bien le tapping sur la composition « Forest Garden ». Les cordes du violoncelle donnent à la composition un côté langoureux et apaisant.
La mélodie « Ocean Breeze » exprime la profondeur, l’espace et la mélancolie.
Les arpèges mineurs se déploient et le thème aux tonalités asiatiques nous émeut. L’instrument traditionnel Asiatique et la guitare forment un très beau mélange.
En 2011, Stanley convie des amis guitaristes à venir jouer sur « Friends » en compagnie de Mike Stern, Bucky Pizzarelli, Charlie Hunter ou encore Russell Malone. Sur le premier titre « Capital J » on a notamment Kenny Garrett qui fait un solo absolument impressionnant du point de vue des trajectoires, ainsi que Nicholas Payton. Le guitariste prend un solo en troisième position et est toujours époustouflant par le jeu sur la touche. La percussion des doigts est tout à fait étonnante.
La seconde composition plus Funky et Soul est interprétée en compagnie de Charlie Hunter.
Retour à un Jazz plus Swing et classique en compagnie de @Bucky Pizzarelli, pour une version de « Lil’ Darlin » toute en douceur et dans un swing où chaque note est jouée avec Feeling.
Avec Mike Stern le focus est tourné vers Coltrane et son chef d’oeuvre « Giant Steps ». Le solo de guitare du plus Hendrixien des guitaristes de Jazz est construit autour de belles phrases tandis que la basse est tenue par Stanley Jordan qui déstabilise par la précision du toucher au cours de son improvisation.
Avec Russell Malone, il joue « Samba Delight », un morceau dynamique où les rythmes syncopés sont joués à merveille par la guitare.
Enfin pour terminer cette présentation de l’oeuvre de ce guitariste d’exception, écoutez le disque « Duets » de Stanley Jordan et Kevin Eubanks qui démarre par un magnifique titre « Morning Sun », où la guitare acoustique joue des arpèges et la guitare électrique envoie des motifs mélodiques. Cette première pièce est assez onirique.
Les deux guitaristes proposent une version de « Summertime » très originale. Ils puisent dans les racines et en même temps les métamorphoses harmoniques sont pointues. La guitare acoustique de Kevin Eubanks verse des larmes, tandis que la guitare de Stanley Jordan joue un accompagnement sobre. Les séquences sont très Blues et secouent les tripes.
« Nature Boy » est très langoureux entre séquences cools et percées de notes.
Au piano Stanley Jordan est également grandiose, puisqu’au piano il nous émeut notamment sur le morceau « A Child Is Born ».
Le morceau suivant « Old School Jam » est une perfusion de groove où les deux guitaristes font tourner une cocotte ravageuse. « Vibes » est une belle séquence toute en émotion où arpèges et envolées en solo nous percutent.
Sur « Blue In Green » le duo entre le piano et la guitare est tout juste majestueux.
Les guitaristes sur ce disque donnent des séquences pleines de sensibilité et éprises de Blues comme on peut entendre sur le morceau « Goin’Home ».
A travers les différents disques qui émaillent la carrière du guitariste, son indépendance entre les deux mains lui permettent de jouer harmonies et solos en même temps. Il est unique en son genre et joue des standards de Hard Bop, de Blues, de Pop Rock jusqu’à des oeuvres classiques.
Critiqué par certains qui considèrent que sa technique proche de celle d’un pianiste n’apporte pas grand chose, je trouve que sa conception de l’instrument est rarissime et celle de l’harmonie est très moderne.
Stanley Jordan est sans aucun doute l’un des plus grands guitaristes et a toute sa place aux côtés des Pat Metheny, John Scofield et autres.

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