Post Jazz

SUR LA ROUTE DU JAZZ/ LATIN JAZZ/ MONGO SANTAMARIA

Il avait mis le pied à l’étrier à l’un des plus grands pianistes de Jazz. Je découvris Mongo Santamaria par Chick Corea qui lors d’une interview, expliquait que le percussionniste Cubain l’avait engagé en 1962.
Ce percussionniste était une grande figure du Latin Jazz un pionnier.
Sa carrière commence au début des années 50, même si il participa à des enregistrements avant. Il pose les premières pierres du « Latin Jazz » par l’exploration des rythmes Caribéens sur lesquels les mélodies et harmonies se déroulent.
Le chanteur en Espagnol déclame une mélodie digne des ancêtres qui imploraient les esprits si vous écoutez le premier morceau « Druma Kuyi ».
La seconde plage « Consejo Al Vive Bien » est dans le même esprit, une percussion intense installant de la tension des flux rythmiques, tels des feux d’artifice. Dès cette exploration, nous entendons dans la musique de Mongo les racines rythmiques liées à l’Afrique qui ont fait éclore les rythmes des Caribéens.
Au cours du morceau « Oromiso » la percussion envoûte fait presque penser à de la Soul.
Le chant installe la joie et l’optimisme tout au long de cette session.
Dans cet album, on entend des rythmes différents comme le Bembé et le morceau « Bembe Kinigua ». Les battements sont rapprochés, le flux rythmique est très tonique.
Le morceau « Chango » est un solo de percussions au rythme moins effréné et à un tempo plus cool. Au fil de cet album, on a une idée des différents rythmes de la musique Cubaine et des régions aux alentours.
En 1958, vous avez le disque « Afro Roots » sur lequel figure la fameuse composition « Afro Blue » que John Coltrane affectionnera en livrant une très belle version et des solos enflammés.
Une certaine douceur est commune à la flûte et à la percussion. La métrique peut s’entendre de plusieurs façons du trois temps du quatre temps ou du 12/8. La flûte part dans un solo aux couleurs Bluesy.
Quand on écoute la musique Cubaine, il faut se laisser emmener par le souffle rythmique que crée la percussion. Le chant et la percussion dynamiques sur le second morceau sont d’un grand tonus. Les cellules rythmiques sont variées et reflètent la diversité de cette musique.
Dans cet album on a des références explicites à la Rumba, au Bata, un rythme issu de la culture Africaine. Le chant « Imaribayo » est construit sur un rythme assez soutenu.
Le dernier titre de cet album « Mazacote » est une séquence de plus de dix minutes, au cours de laquelle les percussions électrisent l’ambiance. La superposition des cellules rythmiques que l’on appelle claves donne le ton et attire l’auditeur sur le chemin de la danse. Autour d’un motif qui reste constant, les percussions offrent un festival absolument renversant.
Enregistré en 1960 « Our Man In Havana » est un exemple de plus de la convivialité et de la chaleur de cette musique. Les cuivres offrent des bouquets sonores tout à fait réconfortants. Les rythmes je n’arrive pas à vous les décrire avec précision mais cette superposition des différentes percussions est la base de ce style.
En 1961, l’ambiance est grandement conviviale et festive avec « Arriba Pachanga ».
Les cuivres accompagnent la flûte tandis que la percussion joue avec douceur.
Le percussionniste reprendra le Blues bien connu du pianiste Herbie Hancock, « Watermelon Man » au style Boogaloo reposant sur le lien entre Latin et Soul. Sur cet album, on retrouve notamment « Afro Blue » au cours duquel le piano part dans un magnifique solo où voicings et belles notes alternent. Le saxophone ténor est puissant.
En 1962, Mongo engage Chick Corea. Je trouve à ce sujet des extraits de « Skins », album dans lequel Chick est sideman comme Hubert Laws ou Nat Adderley. Les riffs de cuivres lumineux sont mis en relief par les percussions.
« Dirty Willie » est un morceau explosif, les cuivres sont d’une grande précision, la percussion se glisse très bien sur ce rythme au tempo rapide.
La tourne d »El Bravo » de 1964 est un cocktail cool de rythmes Rumba.
Les riffs sur « Miedo » sont doux, le saxophone délicieux et les percussions en finesse.
En 1965 le percussionniste publie « El Pussy Cat » imbibé de groove à la Soul Jazz.
En 1966 « Explodes At The Village Gate » se poursuit sur la voie du Groove. Sur « Afro Blue », lorsque la flûte part en improvisation, elle livre une séquence pleine de lyrisme et d’émotion. Le piano part dans un solo sobre épuré et laisse la place aux percussions en jouant une boucle mélodique de sept notes.
La Soul traverse la musique de Mongo comme on peut l’entendre sur le disque « Soul Bag » en 1968. Les envolées de Blues sont d’une énergie terrible.
« Stone Soul » en 1969 « Workin On A Groovy Thing » la même année sont une continuation de ce virage Soul amorcé par le percussionniste.
Ce pionnier du Latin Jazz réalisera encore de nombreux albums dans les années 80 et 90.
En 1980 il publie « Images » qui démarre dans le style Smooth. Les nappes de clavier enrobent la mélodie jouée par les cuivres. La ligne de basse électrique est solide. Sur cette tourne, les riffs de cuivres sont lâchés.
Les mises en place des trompettes saxophones et cuivres est toujours impeccables.
A la même période, le percussionniste joue avec le trompettiste Dizzy Gillespie et l’harmoniciste Toots Thielmans. Dès l’ouverture de ce concert, le percussionniste joue un solo sur une tourne rythmique en boucle jouée par la basse. L’ambiance monte, le tempo croît au fur et à mesure. « Afro Blue » est repris pour une version grandiose de plus de quatorze minutes.
Sur une harmonie de Blues mineur, on entend la percussion telle un poumon qui irrigue les instruments mélodiques pour des improvisations émouvantes.
La flûte puis la trompette de Dizzy nous touche par les directions qu’il donne à son solo.
Sur ce disque bouillant « Summertime » est repris sauce latine. L’alto présente le thème en étant accompagné d’une ligne jouée par les autre cuivres. L’harmoniciste prend la place pour un solo teinté de Blues. n »Mambo Mongo » est un morceau où le sax alto réalise une improvisation hallucinante techniquement et qui met le feu.
En 1984 « Free Spirits » commence très bien puisque des jolies nappes de flûtes nous plongent dans un univers cool.
Le percussionniste Mongo Santamaria montre que les mélodies sont très importantes, un peu comme si les notes dansaient les unes avec les autres. Le saxophone ténor est bouillant comme un ouragan.
En 1990, le concert à Seattle au Jazz Alley est un très beau moment musical.
La trompette s’envole au cours du morceau d’ouverture. Notons la reprise de « Manteca », morceau de Dizzy qu’ils avaient déja joué sur « Afro » en 1954.
Le thème « Ibiano » est un thème que la section cuivres interprète avec sobriété et nuances. Le pianiste joue une improvisation aux phrases limpides et mélodiques.
En 1995 Mongo sort « Mongo Returns ». Il reprend « You’ve Got It Bad Girl » de Stevie Wonder. la percussion emmène les cuivres qui ont un joli groove dans la façon de présenter la mélodie.
La Funk est à haut niveau sur le morceau « Slyck N’Slyde ». La Basse à la Jaco Pastorius, les percussions mettent les cuivres sur orbite.
Sur un tempo lent, la mélodie « Song For Marilyn » est joué par un voile de cuivres soyeux et léger. La flûte est très douce dans l’approche le guiro crépite.
Le sax ténor introduit par des notes sensuelles le thème « When Did You Stop Loving Me, When Did I Stop Loving You ». Le rythme change pour être plus latin pendant quelques secondes.
Mongo SantaMaria participa à des disques importants aux côtés de Cal Tjader Tito Puente que l’on vous a présenté il y a quelque temps déjà.
Peut être le plus connu des albums où il fut sideman est le disque de Dizzy Gillespie intitulé « Afro » en 1954.
A la fin des années 50 il collabore souvent avec le vibraphoniste Cal Tjader amoureux des rythmes latins. la percussion alimente le vibraphone qui joue des solos intéressants. La percussion soutient de près les belles lignes du vibraphone. Au Blackhawk de San Fransisco le vibraphone tape sur les lamelles avec justesse si bien qu’on a la sensation qu’il les caresse. « A Night In Tunisia » est joué lui aussi tout en nuances.
Mongo Santamaria a exploré tout au long de sa carrière de nombreuses cellules rythmiques, les Merengue de république Dominicaine, les tournes Rhuma, Bembé et autres. La Rhumba c’est le lien entre la musique la percu et le chant. Rythmicien précurseur, il était un technicien hors pair capable de s’adapter à des rythmes en dehors de sa culture comme la Soul. Mongo a fait vivre les belles mélodies provenant de son Cuba natal et d’ailleurs sur des rythmes chauds et synonymes de fête.
Avec Machito, il aura été l’un des plus grands percussionnistes de l’histoire du jazz Cubain.

Lire d'autres Posts Jazz