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SUR LA ROUTE DU JAZZ/ ENTRE BLUES ET BE-BOP/ MILT JACKSON/ VIBRATIONS

Le vibraphoniste réalise en 1960 et en 1961 deux sessions qui apparaissent être à contre courant du mouvement de l’époque, fortement imprégnée de Hard Bop. En effet, ce nouveau courant puise dans le Blues et incorpore l’idiome Be-Bop sur des harmonies plutôt modales. Le vibraphoniste membre du Modern Jazz Quartet compose des morceaux dont la structure est assez simple. Sur les huit titres joués, le groupe joue cinq Blues. Vous entendrez des improvisations Be-Bop sur un swing palpitant. Entouré entre autres de Tommy Flanagan et de Jimmy Heath deux boppers de l’époque, le vibraphoniste montre toutefois son attachement au classicisme. Sur le premier morceau « Darbin and The Redd Fox », vous entendrez une introduction en cascade du baryton Tate Houston et du tromboniste Tom Mcintosh et de la trompette. Le thème est présenté d’abord par le vibraphone accompagné de la rythmique basse batterie. Les riffs de cuivres se mettent en place à la seconde grille. En écoutant »Algo Bueno », je trouve une ressemblance très forte avec une composition de Dizzy Gillespie. J’écoute en fait « Woody n’ ‘You » exposé au vibraphone émaillé de quelques notes au saxophone. Trompette, saxophone ténor et baryton, trombone ne ponctuent le solo de vibraphone que sur la seconde grille. La sonorité de Jimmy Heath se rapproche de celle de John Coltrane tant elle est rugueuse et incisive. La tristesse et le lyrisme se dégagent de « With Malice Towards None », thème très mélodieux qui sonne un peu comme un Gospel. Les toiles sonores des cuivres se tissent en toute finesse. « Blue Jubilee » n’est autre qu’un Blues mineur joué à un tempo médium. En introduction, le vibraphone lance des motifs auxquels répondent les riffs de cuivres. Les orchestrations des saxophones de trompette et de trombone sont très punchy. Jimmy Heath s’enflamme en solo en livrant des flots de notes assez denses. Entre chaque solo la trompette est en tête pour lancer un riff en guise d’interlude. Même si Tommy Flanagan est assez classique, il swingue à profusion. Le titre éponyme « Vibrations » est un concentré de bonne humeur. On entend le guitariste Kenny Burrell et sa sonorité chaleureuse. Les « Five Voices » sont savoureuses. L’esprit Blues plane encore sur le morceau suivant « Let Me Hear The Blues » qui ressemble au « Work Song » de Nat Adderley. Tommy Flanagan introduit le thème construit en question réponses entre le vibraphoniste et le saxophoniste. Le son de Jimmy Heath ressemble à celui de Trane. Sur « Melancholy Blues » le Blues est toujours roi. Le vibraphone et la guitare de Kenny Burrell sont en symbiose totale. Les arrangements des Five Voices me rappelle l’album du trompettiste Donald Byrd Donald Byrd – Blue Note Records « A New Perspective », même si l’album que nous commentons, fut réalisé avant. Le disque se clôture par « Sweet Georgia Brown » un des standards les plus connus du répertoire. Après huit mesures jouées par la section de cuivres, le vibraphone prend part lui aussi à l’introduction. Les improvisations du vibraphone du ténor et du piano sont au cœur du Be-Bop sur un tempo très élevé. Au cours de ces sessions réunies sous le nom de « Vibrations », si la forme et l’esprit du Blues règnent sur la plupart des titres, le langage Be-Bop imprègne fortement les différents solistes. Ces sessions montrent à quel point le Jazz tonal est encore présent au début des années 60.

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