À peine j’écoute les premières secondes de ce disque “Right Time Left”, que je suis captivé par le Soul Jazz qui se dégage. Le guitariste Thom Rothella s’inscrit dans la lignée de l’organiste Jimmy Smith et du guitariste Grant Green.
La musique porte en elle les racines du Blues, ce qui n’est pas pour me déplaire. Après une mise en place sur huit mesures ce premier thème décoiffe par son énergie et son tempo up. Sur quelques morceaux, un soliste de grande qualité se joint au combo. Le saxophoniste s’illustre sur le premier morceau “This For Lou”, peut être en hommage à Lou Donaldson, saxophoniste précurseur de ce style de Jazz. Ernie Watts est reconnaissable par sa sonorité, développe des phrases toujours très intenses en débits, impressionnantes d’articulations.
Le guitariste ponctue son solo en single notes de voicings, comme le faisaient les maîtres dans les années 60.
Ce premier morceau nous plonge dans un swing medium up. Le guitariste danse littéralement sur la ligne de basse de l’orgue et sur le drive de batterie.
“How Sweet is It” est très imprégné de Blues, le thème est léger, cela est dû aux très nombreuses respirations.
Le Funk et le groove toujours au cours du morceau “In The Garden”, au tempo tranquille, des phrases fluides de guitare, un son chaud comme celui de l’orgue Hammond de Will Blades. Quelques passages harmoniques me rappellent “Cantaloupe Island”.
Le nom du morceau suivant m’ayant échappé, je regarde son intitulé “Willow Weep For Me”, un standard que Wes avait repris. Le drive du batteur Charles Ruggero est léger. Des accords et des phrases de l’orgue émanent de ma tranquillité.
Le groupe passe à nouveau la grande vitesse, quand il joue “What Hump” d’esthétique Hard Bop. Le phrasé de la guitare est plus innovant, les trajectoires sont différentes des précédentes. Le saxophone est toujours aussi énergique.
Le piano introduit “Lazy Afternoon”, avant que la guitare joue la mélodie. On y entend des séquences vocales, une reverb à la guitare qui surprend, qui rappelle un peu le son de Kurt Rosenwinkel. Le thème est très mélodieux apaisant méditatif.
La Soul est de retour sur “Light It Up”, une composition qui me rappelle l’époque où John Scofield jouait avec le trio Martin Medeski et Wood.
La guitare revient à des phrases plus classiques, mais qui sont jouées avec un groove, que la section rythmique soutient généreusement.
“Benny Thanks” commence par un cycle de deux accords, sur lesquels la trompette et le saxophone interprètent une mélodie simple, faite de quelques notes. La discrétion de la trompette et du sax est notable sur le plan du volume et des nuances au cours de ce thème, qui rappelle l’esthétique de Benny Golson.
Ernie Watts est sans doute le plus expressif et le plus mélodieux, sa sonorité est très personnelle et nous séduit.
Thom Rotella poursuit par une Bossa très mélodique “Mr Malone”, que la guitare interprète avec beaucoup de sensibilité, comme le piano et ses quelques notes.
Si des séquences sont plus émouvantes, le guitariste reste dans cet esprit Soul Jazz comme vous l’écoutez, dans l‘hommage au contrebassiste Ray Brown sur Ray Brown’s Shoes”.
Une séquence reposante est la reprise de “The Girl From Ipanema”, où chaque soliste se maîtrise, pour ne jouer que quelques notes loin de la technique. La guitare aime bien partir de temps à autre en double croches. Les glissés sont sensuels.
Le groupe utilise la métrique à 6/8 pour jouer un morceau des plus standards, “It Ain’t What It Ain’t, irrigué par le Blues tout le long.
Les phrases de guitare sont limpides et le son toujours aussi doux et rond au cours de ce Blues mineur.
Pour conclure ce disque, le thème de fin n’est plus ancré dans le Blues.
Il s’agit d’une ballade intitulée “Shimmer”, dont la mélodie est présentée par la trompette. Des voiles de voix de Tierney Sutton émaillent le morceau, la guitare captive par ses lignes solaires.
Classique et sans prétention, le jeu de Thom Rotella est enjoué, la sonorité ronde. Plein de swing, il nous fait revivre cette grande époque d’un des styles du Hard Bop. Sans démonstration de virtuosité, la guitare m’a séduit par ses lignes en solo classiques, souvent et plus modernes parfois.
Il réalise cet album chez High Notes, fort plaisant à écouter, composé de thèmes tous autant mélodieux les uns que les autres, qu’ils soient dans le registre Blues ou dans un domaine plus moderne.
Le disque est publié chez High Note.
En écoute, le thème “How Sweet Is It”.