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NOUVEAUTÉ ALBUM/ PAOLO FRESU/ LEGACY

Le trompettiste Italien vient de réaliser un dernier opus en compagnie d’Uri Caine, pianiste avec qui il joue depuis de nombreuses années.
Tel un peintre, il jette ses notes de trompette que le piano enrobe d’arpèges et de voicings.
Les premiers extraits dénotent une interaction, une symbiose entre piano et trompette qui
qui vont vers des horizons abstraits. L’esthétique s’étire.
Le dialogue entre les deux musiciens s’effectue sur fond d’improvisations totales. Les voicings du pianiste groovent presque quand on écoute “Magenta”. Le timbre de la trompette s’approche de la sonorité de Miles Davis.
Les sonorités changent en fonction des ambiances, au cours desquelles on entend des harmonisations à l’aide d’effets électroniques. Ils se jettent dans le grand vide de l’improvisation. Tantôt le duo recrée l’ambiance du vide, tantôt le swing qu’il a en toile de fond.
Le piano électrique est énigmatique et déroule des solos émouvants.
Le clavier et la trompette sur “Isabella” créent une émotion, celle de la douceur du regret. La trompette est enveloppée par les nappes du clavier électrique.
Dans ce projet basé autour de l’improvisation, les musiciens expriment magnifiquement cette idée de l’espace.
Paolo Fresu et Uri Caine cherchent sans cesse des chemins harmoniques et mélodiques.
La trompette lance des phrases auxquelles le piano ou le clavier répond de voicings et d’accords mystérieux. Ce qui est original et poignant, c’est d’assister à ce cheminement en duo sans grille, sans direction choisie à l’avance.
J’aime la direction prise sur “Rosso Tiziano”, une énergie se crée au tournant des phrases de Paolo Fresu. Plus calme et tantôt plus swing, ce morceau est très intéressant dans l’alternance des ambiances.
Les sonorités des synthés traduisent parfois l’idée du vide et de la profondeur.
Entre Jazz et quelques accents de musique Classique, le duo nous emmène vers des climats tantôt heureux, tantôt plus nostalgiques.
Sur le second disque, Paolo se trouve entouré entre autres du pianiste Roberto Cipelli et du guitariste Bebo Ferra. Par moments on entend des passages Jazz Rock et parfois des séquences plus acoustiques.
Le morceau “Gligio” est pris sur un rythme groovy assez sympa sur lequel la guitare laisse s’envoler quelques notes pour répondre à celles du soprano. La composition “Scarlatto” est d’une énergie incroyable, sonnant presque Free Jazz par moments.
Le son de la guitare et la sonorité de trompette me fait penser par moments au disque “We Want Miles” de Miles Davis. On a ces sonorités à la Barry Finnerty guitariste de fusion des années 70 et 80.
Quelques passages sont aussi plus intimistes comme la morceau “Bianco”.
Les sonorités électriques se retrouvent dans le morceau “Indaco” distillant mystère.
Version assez surprenante de “My Man’s Gone Now”, arrangée en un style Jazz électrique qui prend le tournant du Swing pendant un moment.
Le troisième disque revient à une tourne plus acoustique par moments, au carrefour du Jazz Rock. Les accents sont parfois même Free avec le mouvement intitulé “Kaki”.
Le swing est dynamique sur “Platino”.
Plus dans l’introspection, le morceau “Magnolia” nous fait imaginer la profondeur et l’espace.
L’approche du trompettiste Italien est particulière, surprenante. La guitare à la sonorité moderne joue un solo très mélodique sur “Lampone”. Les balais et la contrebasse sont d’une douceur.
Entre acoustique et musique aux nombreux effets, Paolo Fresu aime les variations de climat. Ces effets donnent le sentiment de l’irréel. Les dissonances, les solos de clavier électrique envoient quelque chose de mystérieux.
Par moments, le climat est sombre, étrange et trouble et c’est le cas avec “Tenné”.
Sur “Prugna” la contrebasse avance avec sa walkin magnifique, ponctuée de voicings au clavier. La trompette bondit sur cette rythmique qui joue tout en douceur. Les phrases du clavier se tissent avec en fond des riffs de sax et de trompette redondants.
Trompette et le sax jouent un groove délicat en douceur sur “Only Women Bleed”.
Le dernier titre “Sono Andanti Fingevo de Dormire” est une très belle ballade au cours de laquelle, le soprano me percute par les émotions qu’il dégage et sa sensibilité.
Au fil de ces trois disques, Paolo Fresu nous présente une fresque sonore à travers les différents styles, le Swing, le Jazz électrique parfois le Free mais aussi le groove.
Entre méditation et climats plus tendus, plus énigmatiques, le trompettiste et ses musiciens explorent des couleurs musicales comme le peintre les explore en les propageant sur la toile.

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