John Beasley, pianiste, chef d’orchestre et arrangeur est à la tête de ce Big Band au nom original, le « Monk’ Estra ». Ce musicien a collaboré avec Sergio Mendes et a été sideman de Freddie Hubbard. L’album part sur des accents Mingusiens, avec les ronflements du baryton, les salves des autres sax et les cris bluesy des trompettes. Le thème be-bop intitulé « Steve O » plutôt tranquille, repose sur des phrases calmes et fluides. Au cours des solos, l’orchestre a un swing d’enfer, le pianiste s’échappe en solo avec des phrases brûlantes. « Sam Rivers » est un thème aux mises en place complexes de haute précision. J’aime le contraste entre ce tempo up-swing et le pianiste qui caresse ses touches au début de l’impro. A 1’51 les phases sont tout de même d’une grande intensité. La reprise de « Monk’s Mood » est très surprenante par la nervosité rythmique, les flots de notes de piano et cet harmonica au son cristallin. « Donna Lee » crée également la surprise par le rythme latin et l’exposé du thème à la flûte. Avec la très belle mélodie « Song for Dub » écrite en trois temps, les cuivres et la flûte sont d’une légèreté absolue. L’ombre de Monk est toujours là avec « Five Spot », au cours duquel le saxophoniste est épris de romantisme. Avec « Implication » John Beasley s’éloigne quelque peu du grand Monk. Les arrangements et l’originalité rythmique se rapprochent davantage de Charlie Mingus. Le morceau en hommage à Hugh Masekela est dans un esprit Soul Jazz avec une mélodie festive. « Rythm a Ning Evidence » commence de façon classique pour ensuite prendre un tournant groove et funk. Cette version est un va et vient entre swing et binaire, avec un solo d’orgue Hammond très énergique. « Off Minor » est joué sur le mode binaire ternaire. Sur « Be.You.tiful » le groove du piano est subtil les échappées de notes magnifiques. La version de « Locomotive » de Monk est un grand moment de douceur, accentué par les cuivres et le solo de flûte. « Come Sunday » est apaisant le solo de ténor nous entraîne avec des nappes de cuivres hypnotiques. Le pianiste signe un très beau disque. Entre arrangements soignés et standards revisités avec originalité, la séduction opère.