Ce nouveau disque du batteur Matthieu Chazarenc s’ouvre par un morceau rayonnant, où la voix est propulsée par une rythmique au souffle magistral. En introduction, le mystère s’installe, l’accordéon de Laurent Derache commence le thème, puis la trompette de Sylvain Gontard prend le relais, pour s’envoler avant que la voix ne se pose en délicatesse. Le rythme est intense, la batterie explosive.
Le thème « Rue Marcelle » est une jolie valse retraçant une époque nostalgique d’un temps qui n’existe plus.
Christophe Wallemme à la contrebasse a une très belle assise rythmique.
La batterie se déploie magistralement sur « Torre Del Mar », pendant que l’accordéon et la trompette dialoguent sur une mélodie qui résonne comme un tango.
On y entend l’oud dérouler un solo pour nous rappeler les ponts entre les deux rives de la Méditerranée.
La composition « Cambio » se construit sur un rythme en triolets, à partir duquel la contrebasse déploie ses notes, donnant l’élan à l’accordéon pour qu’il puisse s’exprimer. La trompette se joint à ces motifs qui sont d’un grand dynamisme alors que la voix de Malou Oheix est juste et d’une grande technique.
Des accords de piano tout en douceur introduisent le thème « Lagun », un thème aux nombreuses respirations où le sentiment d’évasion domine. Le pianiste Thomas Encho joue tout en douceur et sensibilité et à cela, l’accordéon répond par des motifs tout aussi légers.
Le rythme s’emballe sur « Kamkwamba », une mélodie ancrée dans l’Afrique faite de nombreuses notes jouée par la trompette et l’accordéon.
La chanson “Terra Madre” est connotée nostalgie et regrets.
Le batteur confectionne au fil de son projet une musique respirant l’exil, l’émotion et le voyage.
« Rond De Paris » laisse planer une impression de doute de noirceur. La contrebasse part dans un solo avec en fond des contrechants de l’accordéon et de la trompette.
« Deux Anges » est aussi très lyrique, on y entend d’ailleurs les cordes sangloter, le souffle si beau de la trompette, ainsi que l’accordéon qui joue sobrement. Sur cette composition, les cordes accentuent le sentiment de tristesse. Les couleurs de ce disque sont également orientales si vous écoutez le titre « Miharbi ».
L’oud de Mohanad Aljaramani prend le thème accompagné de l’accordéon et de la trompette. La trajectoire orientale participe de l’éclectisme que le batteur a voulu donner à son projet.
Pour conclure ce disque, l’accordéon entame par un motif épris de gravité que la voix vient ponctuer de notes elles aussi apaisantes. L’espoir se dessine lorsque la trompette rentre à 2’03 pour jouer des notes qui sont un délice.
Je vois ce projet « Canto III » comme des séquences qui ont toutes un lien entre elles. Cette oeuvre est composée de thèmes qui ressemblent plus à des mouvements que des mélodies à part entière, sauf peut être la valse « Rue Marcelle ». Les couleurs que le batteur arrive à agencer celles de l’accordéon, de la trompette, du piano et de la voix, illustrent sa grande sensibilité, une grande finesse dans l’écriture et la conception.
C’est un très joli disque que je vous conseille. En plein lyrisme servi par des belles mélodies, « Canto III » est un beau voyage à travers des sonorités raffinées.