Mathias Eick, trompettiste norvégien au son cristallin et mélancolique, revient avec « Lullaby », pour un sixième album en tant que leader chez ECM. Loin d’être un simple enchaînement de ballades paisibles et embrumées, cette œuvre est un voyage musical captivant qui démontre l’évolution constante de l’artiste et la puissance créatrice du jazz nordique.
Né en 1979 dans une famille de musiciens, Mathias Eick s’est forgé une solide réputation sur la scène jazz internationale. Multi-instrumentiste talentueux, il a collaboré avec des artistes renommés tels que Chick Corea et Pat Metheny, tout en développant sa carrière solo. Depuis son premier album « The Door » en 2008, Eick n’a cessé d’affiner son style, mêlant influences folk nordiques et jazz contemporain.
Pour « Lullaby », Eick s’entoure d’un quartet de haut vol. Au piano, on retrouve Kristjan Randalu, dont le jeu lyrique et fluide apporte une nouvelle dimension à la musique d’Eick. À la contrebasse, Ole Morten Vågan assure une assise solide, tandis que le nouveau venu Hans Hulbækmo apporte une fraîcheur rythmique à la batterie. Ensemble, ils forment un groupe soudé capable de naviguer entre mélodies envoûtantes et improvisations audacieuses.
L’album, enregistré au Rainbow Studio d’Oslo, porte la signature sonore distinctive du label ECM. Fondé en 1969 par Manfred Eicher, ECM continue à jouer un rôle important dans la promotion du jazz européen, en particulier scandinave. La qualité sonore exceptionnelle et l’approche esthétique unique du label ont contribué à façonner une identité musicale reconnaissable entre mille.
« Lullaby » s’inscrit dans cette tradition tout en la poussant plus loin. Les huit compositions originales d’Eick explorent un territoire musical vaste et varié. De l’ouverture contemplative de « September » à l’intensité croissante de « Vejle », l’album oscille entre moments d’introspection et passages plus dynamiques. La trompette d’Eick, toujours empreinte de mélancolie, se mêle aux textures harmoniques complexes créées par ses compagnons de route.
La touche nordique, marque de fabrique d’Eick, est omniprésente dans « Lullaby ». On y retrouve ces paysages sonores évocateurs, ces mélodies aux accents folk qui semblent émerger des fjords norvégiens. Pourtant, l’album marque aussi une évolution. Les improvisations sont audacieuses, l’interaction entre les musiciens intense. Eick n’hésite pas à utiliser sa voix sur le morceau “Free”, et des synthétiseurs pour enrichir la palette sonore du groupe.
« Lullaby » est un album à la fois accessible et qui demande une écoute attentive, récompensée par la découverte de subtilités musicales qui se révèlent au fil des écoutes. C’est une œuvre qui témoigne de la maturité artistique d’Eick et de sa volonté constante de se réinventer.
Alors que Mathias Eick entame une tournée européenne pour présenter ce nouvel opus, « Lullaby » s’impose déjà comme un jalon important dans sa discographie. Il confirme le statut du trompettiste comme l’une des voix les plus originales du jazz nord-européen contemporain. Avec cet album, Eick nous invite à un voyage musical envoûtant, où la frontière entre rêve et réalité s’estompe au son d’une trompette qui murmure des secrets nordiques.