Le saxophoniste Branford Marsalis très imprégné par le Jazz de John Coltrane, revient avec son Quartet et ce disque “Belonging”, un album dans lequel on entend Soul Jazz et une musique plus spirituelle.
En introduction de “Spiral Dance”, la contrebasse et le piano tiennent une basse sur seize mesures, avant que le sax n’entonne la mélodie. La sonorité est proche de Michael Brecker, la mélodie lumineuse dans l’esprit de Pat Metheny. Cette première composition donne le ton d’entrée l’album celui de l’énergie.
C’est Joey Calderazzo qui est le premier à partir en solo. Il démarre par des phrases tranquilles, puis monte en puissance, en faisant une référence à “Acknowledgement”, premier mouvement de “A Love Supreme” de John Coltrane. Cet emprunt est à 2’37
Est-ce voulu ou non, vous apprécierez ensuite la fulgurance des notes à 3’21.
Au sax ténor, les phrases sont intenses de suite. Entre groove et esprit Jazz, Branford Marsalis impressionne par sa maîtrise. Le contrebassiste Eric Revis fait gronder les notes qui claquent.
“Blossom” est un moment d’émotion puissante. Le piano déroule des arpèges tendres et délicats. À ces notes, se joint le saxophone au son moelleux pour des phrases intimistes et douces. La sonorité et les quelques notes du début du thème, sont poignantes évoquant un blessure et espoir.
Groove et Soul sont au rendez vous, lorsque le quartet joue la composition “Long As You Know As You’re Living Yours”. Sur un rythme bien binaire, le ténor apporte beaucoup de chaleur par le son et la mélodie. Sur un tempo cool, les trajectoires mélodiques sont plutôt Bluesy. Vers 3’40, la trajectoire de l’impro est plus sur des couleurs orientales avant que Branford n’use de sa grande technique en enchaînant des flux de notes impressionnants.
Au piano, Joey Calderazzo reste lui sur des couleurs plus Soul à la “Watermelon Man” ou “Cantaloupe Island”, deux morceaux groove incontournables d’Herbie Hancock dans les années 60.
Le toucher de piano est aussi très poétique, lorsqu’il déploie accords arpèges sur “The Belonging”, une mélodie que le saxophoniste joue au soprano, en faisant ressortir de la fragilité. La douceur du piano, son esprit est proche du style d’Herbie Hancock lorsqu’il joue les ballades. Il diffuse accords et arpèges empreints de nostalgie. Le soprano s’envole, se met en quête d’un ailleurs, d’un autre horizon sonore. L’intensité arrive à la dernière minute du morceau. Le sax enflamme la rythmique d’Eric Revis et du batteur Justin Faulkner.
La composition suivante “The wind Up” ressemble par certains passages à “Song For Bilbao” de Pat Metheny. Le thème est truffé de mises en place du batteur. Le pianiste démarre tout seul son solo, avant d’être rejoint par le swing du contrebassiste et du batteur. Le pianiste se lance dans des phrases extrêmement tendues du point de vue des débits, fait bouillonner la contrebasse et la batterie. Le sax ténor atteint des sons insoupçonnés explore cherche, la rythmique va vers un rythme déstructuré aux limites du Free. Les trois musiciens reviennent ensuite vers ce swing endiablé.
Le sax et ses compagnons nous emmènent sur cette fin de disque sur des chemins quelque peu troubles et mystérieux. La contrebasse tremble, le batteur exécute des roulements sur la caisse claire pour ensuite user des balais pour accompagner Eric Revis dans des phrases énigmatiques.
Le piano explore ce cadre rythmique et harmonique, qui paraît d’une grande liberté. La conclusion se fait dans le Free. Le saxophoniste tourbillonne sème une tornade.
Le morceau se termine dans un climat apaisé où la pression redescend. A la batterie est moins percutant, les notes de contrebasse plus délicates et quelques couleurs orientales se font entendre.
Avec ce nouvel opus, Branford Marsalis montre une nouvelle fois qu’il est un saxophoniste incontournable, par ses qualités d’improvisateur, de compositeur de thèmes ancrés dans le Soul Jazz, mais aussi dans une musique plus Coltranienne. J’ai découvert Branford Marsalis lorsqu’il jouait avec Sting, puis c’est avec “Requiem”, que je l’écoutai en leader pour la première fois.
Entre technique et recherche de la mélodie, Branford est subtil, ne fait pas uniquement preuve de virtuosité, mais recherche toujours de nouvelles phrases pour servir une musique technique mais élégante.