Post Jazz

NOUVEAUTÉ ALBUM/ ALAN BROADBENT/ THREADS OF TIME

Le pianiste Américain Alan Broadbent autrefois pilier du Charlie Haden Quartet West, publie en quintet “Threads Of Time”, un disque pétillant et lumineux par le swing et les mélodies d’esthétique Hard Bop.
Le pianiste commence ce très joli répertoire par “Another Time”. Tournant sur deux accords, la rythmique impulse un swing médium cool, a partir duquel le sax et la trompette déploient le thème. Quatre mesures d’introduction au piano, une première partie au sax et à la trompette qui sonne dans l’esprit de Benny Golson. Le piano reprend la première moitié, puis à nouveau’ la trompette et le sax concluent le thème, avant que ce dernier ne s’enflamme en triolets et double croches. Au piano le jeu n’est qu’élégance et fluidité.
Le pianiste et son quintet magnifient le Hard Bop énergique rendant un bel hommage à l’un des plus grands trompettistes de l’Histoire, Clifford Brown.
Scott Wendholt est imprégné du style et de la sonorité de cet immense musicien au cours de “Clifford Notes”. Les notes sont bien déliées, les phrases bien articulées à partir de ce thème à la structure de 32 mesures. Le passage de relais entre la trompette et le sax est très bien amené.
Les envolées du ténor Sam Dillon valent elles aussi le détour. Comme le font souvent les Jazzmen en fin de morceau, ils jouent des solos alternés avec la batterie de huit mesures.
Sans prétention d’innover, le quintet joue un Hard Bop mélodieux. Alan Broadbent retrace à travers ses compositions la période du Be Bop et du Post Bop.
“Covenant” est un thème épuré qu’introduit le piano par un accord mineur majestueux, puis par des arpèges égrenant les notes du thème . Le sax et la trompette présentent cette mélodie évoquant les faiblesses et fragilité. Le pianiste déploie des phrases poignantes et surtout très mélodiques.
À la contrebasse, c’est Harvie S qui donne aux notes toute leur rondeur puis le thème se conclut dans un climat apaisé.
“Journey Home” me rappelle par le tempo le rythme et la mélodie, le thème “Silver’s Serenade”. Les instruments rebondissent bien sur le drive de la batterie et font tous preuve d’élégance. Le saxophoniste varie les débits croches en triolets, la trompette s’envole, puis à pas légers arrive le tromboniste Eric Miller. Le piano n’exagère jamais la technique, privilégie le toucher en finesse et les phrases mélodieuses.
Au cours de la séquence suivante, j’aime l’éclosion de la mélodie Prélude To Peace”, des voix de la trompette, du saxophone et du trombone.
Le piano est encore et toujours sous le signe de l’élégance et de la poésie.
Au cours de ce morceau, les mises en place sont nombreuses, les motifs des cuivres à partir de 3’57 jusqu’a 5’08, sont lumineuses et très bien amenées. Aux motifs dynamiques souvent en doubles croches le contrebassiste revient à l’emotion à l’aide son archet.
La direction est plus Be-Bop au cours de “This One’s For Bud”, un thème développé par un solo de piano qui swingue, une contrebasse bien ronde et le batteur Lucas Ebeling qui fait preuve de souplesse dans son usage des balais.
Le pianiste et ses compagnons interprètent un très joli trois temps qui s’intitule “The Long Goodbye”, un morceau qui reflète le feeling du pianiste. On ressent ce parfum de romantisme qu’on retrouvait dans le Quartet West de Charlie Haden. Alan Broadbent montre toute sa sensibilité, en caressant les touches de son piano, cherche la mélodie même en improvisation.
Toujours dans l’intimisme, Harvie S et son toucher de velours, chemine au travers de phrases et de notes douces. Les parties jouées au sax et à la trompette révèlent de vraies qualités d’arrangement.
Accrochez vous en cette fin d’album, quand la section sax trompette trombone présente la mélodie aux élans Be-Bop soutenus par une section piano contrebasse et batterie pétillante d’énergie.
Le trombone part en premier dans notes bien déliées, puis la trompette s’en va vers d’autres directions. Le saxophoniste aime jongler avec les débits.
En grande décontraction, Alan Broadbent fait swinguer les notes du solo articulées à la perfection.
Ce disque publié chez Savant est le fruit d’une sensibilité et d’une inspiration partagée par tous ces musiciens.Les compositions sont toutes un régal à savourer, les improvisations du leader et de ses sidemen, sont tout aussi un régal. Ce disque montre que certains musiciens mettent en valeur l’importance des mélodies et restent ancrés dans ce Jazz lié au Hard Bop, celui des pianistes Horace Silver, Sonny Clark et de tant d’autres.