Il était un des derniers monstres sacrés du Jazz. Pendant 60 ans, il fut un innovateur, un grand saxophoniste et surtout un grand compositeur. Il fut sur les sommets et ce jusqu’à son départ.
L’immense Wayne Shorter vient de nous quitter à l’âge de 89 ans.
Il remplacera Benny Golson au sein des Jazz Messengers en 1959. Il participera à une longue série d’enregistrements du groupe sur le label Blue Note. Je me rappelle de « Like Someone In Love » en 1960 avec des moments grandioses comme « Sleeping Dancer Sleep On » ou « Giantis » morceau au tempo up Swing. « Mosaic » » Night In Tunisia » autant d’albums qui ont façonné le Jazz Hard Bop par des arrangements explosifs et des rythmes enflammés.
Il culminera tout en haut à la fin de l’année 1964, lorsqu’il complète le quintet de Jazz du trompettiste Miles Davis.
Dans cette période de la même année, il publie à mon sens trois monuments du Hard Bop liant les racines du Blues au Jazz Modal avec trois albums qui font date, »Night Dreamer » « Juju » et « Speak No Evil ». Le saxophoniste y publie des pieces
Avec Herbie Hancock, Ron Carter et Tony Williams, il succède à George Coleman et Sam Rivers dans ce groupe historique. Les contorsions harmoniques, les expériences rythmiques comme les nombreuses explorations polyrythmiques de ce quintet en font une formation exceptionnelle.
Le saxophoniste y déroule des solos à la sonorité rugueuse et métallique mais terriblement novatrice pour l’époque.
Avec ce groupe il apportera des compositions seront un véritable renversement esthétique comme « Footprints » ESP » ou encore « Masqualero ».
Il participe avec Miles à l’enfantement du Jazz Rock et le disque « Miles In The Sky » de 1968. Peu après, ses tornades de soprano sur « In A Silent Way » ouvrent une nouvelle voie. En 1970 il fonde « Weather Report » avec le clavieriste Josef Zawinul. Pendant une quinzaine d’années cette formation sera un laboratoire d’expériences sonores et harmoniques alliant le Rock au Jazz Modal. Me vient à l’esprit, le solo de Wayne sur « Havona » qui vient d’une contrée sonore presque mystique.
À la fin des années 70, il est avec les anciens membres du quintet légendaire de Miles pour un disque intitulé « Quintet VSOP ». Le saxophoniste continue l’exploration de ce Jazz Modal basé sur l’interaction permanente et la déstructuration du rythme. Dans les années 80 il publiera entre autres « Atlantis » un disque où le soprano nous émeut par les chemins qu’il prend. C’est le prolongement de la tournure artistique du Jazz Rock de Weather Report. Sur ce disque on savoure « The Three Marias » une mélodie qui nous emporte vers le rêve et l’évasion.
En 1994, il sort le disque « High Life » où la musique très électrique rappelle celle de Miles des années 80.
Et en 2001, Wayne Shorter reviendra au Jazz acoustique entouré d’une équipe de haut vol, John Pattitucci Brian Blade et Danilo Perez. Le quartet prolonge ce que le saxophoniste avait commencé à explorer au milieu des années 60. L’interaction entre les musiciens n’a jamais atteint un tel niveau.
Jusqu’au bout Wayne Shorter écrira de la musique. Ces derniers mois, il publia le disque enregistré en live à Detroit, accompagné de Leo Genovese, Terri Lyne Carrington et Esperanza Spalding.
Cette musique nous emmène sur des voies mystérieuses où onirisme et abstraction se mêlent.
Je vous laisse avec le thème de 1964 « Infant Eyes », un véritable chef d’œuvre de mélodie où l’émotion repose sur des harmonies sophistiquées et raffinées.
Wayne Shorter n’aura jamais cessé de découvrir des horizons harmoniques fantastiques et fascinants. Ses morceaux incontournables dans le Jazz moderne faisaient de lui un géant.
Nous présenterons demain d’autres grandes pièces de ce voyageur du Jazz.