John Massa et Henri Fiore programmaient hier soir au Centre Solea, le pianiste Toulousain Amaury Faye qui avait déjà joué chez eux au Jam, quelques années auparavant.
Le musicien nous a présenté hier, son dernier album “Arise”, un récit en musique de quelques séquences de sa vie, ses échappées en haute montagne, au rythme d’ascensions, de ces grands espaces en altitude. À travers ses compositions originales, il expose son ressenti de ces moments précieux.
Au fil des trois grands mouvements, ce musicien m’a touché par l’éclectisme des climats qu’il distille, sa perpétuelle quête de mélodie.
La soirée s’ouvre alors par la première composition “Stone Heart”, un morceau binaire au groove porté par la contrebasse de Louis Navarro et la batterie de Guillaume Prevost. Quelques accents Bluesy se glissent dans ce thème interprété avec élégance par la saxophoniste altiste Olga Amelchenko. L’accompagnement de la rythmique laisse entendre le désir d’exploration et l’écoute mutuelle entre les musiciens. Après un solo d’alto aux trajectoires intéressantes, le pianiste maintient l’intensité en développant des phrases percussives.
Ce répertoire autobiographique se poursuit par une séquence plus introspective, durant laquelle le piano sème des accords profonds et méditatifs. On écoute des emprunts au classique, puis des retours vers le Jazz au cours de “Under The Ground”, un thème langoureux très mélodieux. Les balais sont tout doux et le souffle au sax si délicat. La contrebasse est animée par un sens mélodique affiné, avant de passer le relais au pianiste dont la finesse du toucher sert la mélodie.
Le rythme binaire ternaire du thème “Uprising” apporte du dynamisme aux solistes et notamment à la saxophoniste, dont le jeu et les phrases surprennent. Le piano aère ses phrases mélodieuses aux flots puissants.
Autre moment poignant est quand le pianiste introduit avec finesse “The Ancient”, un hommage à son grand père. De ce thème, la contrebasse traduit cette impression d’ascension et de profondeur par des notes en rondeur.
Le second set débute par la composition intitulée “Blossom”, qui me semble construite sur une métrique en 5 temps. Optimiste et lumineux, le son du saxophone est moelleux et les articulations fluides.
Le quartet enchaîne par une composition dont la partie introductive de piano nous emmène sur les chemins du rêve et du mystère. Émouvants sont les accords au piano, qui évoquent le classique. Puissante est la main gauche assortie de tourbillons en arpèges sur la composition “La Sambuy”.
Le quartet enchaîne par “Strange Meeting” du guitariste Bill Frisell, un thème inspirant empli de romantisme. Cette composition s’inscrit dans l’univers sonore du pianiste, une musique qui laisse imaginer les vastes espaces. Le solo de contrebasse n’est que poésie tant les notes m’émeuvent.
La rythmique explosive monte en pression sur le morceau suivant intitulé “Home”, signé de l’altiste David Binney. Comme une rupture avec les frappes énergiques du batteur, le contrebassiste part le premier en solo.
Toujours expressif, il ne laisse aucune note au hasard, comme le batteur qui varie le jeu et crée un bel interplay. Le pianiste s’envole vers des phrases renversantes. Sur une tourne de batterie et contrebasse, la sax propage un souffle magistral entraînant avec elle tout le quartet.
En dernier morceau, le quartet propose “Free Ride”, une composition up-swing telle de la dynamite. La saxophoniste s’envole, suivie par les variations du batteur et de la walkin rapide de la contrebasse.
La synergie entre le pianiste et le binôme contrebasse batterie, est fascinante sur ce morceau, digne des grands standards de Be-Bop.
Amaury Faye nous a touchés hier par ses compositions originales, un voyage à travers les sons et l’imaginaire qui m’a procuré la sensation d’élévation proche du spirituel. Malgré les échappées techniques et les complexités rythmiques, son Jazz est fait de thèmes mélodieux honorés par une belle emphase entre musiciens et des improvisations d’une grande sensibilité.